Les cerisiers sont lourds
comme les amoureux surpris par l'orage.
Je connais une femme, sur la route,
infatigable,
qui pèse les morts,
lutte jusqu'à ce que la mer tombe,
et c'est pour elle que je dis, maintenant :
les cerisiers sont lourds
comme les amoureux surpris par l'orage.
Lorsque nous aurons perdu de vue la valeur
des heures et des kilomètres,
nous nous arrêterons
et sans avoir besoin de se dire aucune parole,
nous nous regarderons longuement.
Mais ce jour-là, mon ami, je rentrerai seule.
Je retraverserai dans l'autre sens, le fleuve,
les anneaux périphériques, les abords de la ville,
jusqu'au jardin devant la maison ;
à la nuit tombée je rentrerai chez moi.
J'espère, alors, que pour m'accueillir,
le vent fera trembler, de toutes ses dents,
le palmier du jardin voisin.
Poèmes extraits des pages 13 et 34, Editions Le Citron Gare, juin 2016 ( Avec les estampes de Judith Bordas).